Longtemps associé à l’excellence de l’objet et au raffinement des savoir-faire, le luxe aborde une nouvelle étape de son histoire. À l’heure des bouleversements culturels, technologiques et sociétaux, il ne se contente plus de séduire par la matière : il se vit, se ressent et se partage.
C’est ce que révèle l’étude internationale menée par Sociovision (Groupe Ifop) en partenariat avec Luxus+, auprès de 4 535 consommateurs de luxe dans sept marchés majeurs — de la France aux États-Unis, de la Chine au Japon. Une photographie précise d’un luxe en mouvement, à l’image d’une société en quête de sens et d’émotions.

Du symbole social à l’expérience intime
Le premier enseignement de l’étude est clair : derrière chaque achat de luxe se cache une motivation profonde.
Cinq grands moteurs structurent aujourd’hui la relation des consommateurs aux marques : le statut, l’inspiration, l’évasion, la récompense et l’investissement.
Si le luxe demeure un marqueur de réussite sociale, il s’impose désormais comme un espace d’expression personnelle. On n’achète plus seulement pour montrer, mais pour ressentir, créer, célébrer ou transmettre. Le prestige ne se limite plus à l’apparence ; il se loge dans l’intensité de l’expérience vécue.
Cinq profils pour un luxe pluriel
Cette évolution se traduit par une fragmentation inédite des profils de clients.
Les Connaisseurs, attachés à la maîtrise des savoir-faire, côtoient les Chercheurs de statut, tandis que les Rêveurs privilégient l’émotion et l’évasion. Mais ce sont surtout les Hédonistes et les Créatifs qui redessinent aujourd’hui les contours du luxe.
Plus jeunes, plus curieux, ils placent l’expérience au cœur de leur rapport aux marques. Voyages, gastronomie, collaborations artistiques ou projets créatifs rivalisent désormais avec les objets iconiques. Une bascule silencieuse mais profonde : le luxe se vit plus qu’il ne se possède.
Produit ou expérience : un nouvel équilibre
Si l’objet conserve une place centrale — 54 % des consommateurs continuent de le privilégier —, près d’un client sur deux se tourne désormais vers des expériences de luxe.
Le moment, le souvenir et l’émotion deviennent des valeurs aussi désirables que la rareté ou la signature.
Cette mutation traduit une aspiration plus large : celle d’un luxe fluide, moins figé, capable de s’inscrire dans des trajectoires de vie plutôt que dans des vitrines.
Trois défis pour les marques de demain
Face à cette recomposition, les maisons de luxe sont confrontées à trois enjeux majeurs.
D’abord, réaffirmer la valeur de l’expérience physique dans un monde saturé de digital. Le contact humain, l’expertise et la dimension sensorielle demeurent irremplaçables.
Ensuite, intégrer pleinement l’éthique et la durabilité dans leur récit. Pour les jeunes générations, la responsabilité environnementale et sociale n’est plus un supplément d’âme, mais un prérequis.
Enfin, apprivoiser l’intelligence artificielle, déjà utilisée par 67 % des consommateurs de luxe. Un outil perçu non comme une menace, mais comme un levier d’information, de conseil et de relation client.
Un luxe en quête de lien
« Nous voulions revenir aux motivations fondamentales derrière l’expérience du luxe », explique Rémy Oudghiri, sociologue et directeur général de Sociovision. « Comprendre pourquoi, aujourd’hui encore, les individus restent profondément attirés par les produits et les expériences de luxe. »
La réponse tient en un mot : connexion.
Entre héritage et innovation, le luxe de 2025 ne cherche plus seulement à impressionner. Il aspire à créer du lien, à raconter des histoires sincères et à offrir des expériences qui laissent une empreinte durable.
Un luxe moins démonstratif, mais plus profond — à l’image d’un prestige qui, désormais, se mesure autant à l’émotion ressentie qu’à l’objet acquis.
Rédaction par Mariya Romanova
