Il est des lieux qui racontent Paris à eux seuls. La brasserie Mollard, nichée au 115 rue Saint-Lazare, appartient à cette catégorie rare : celle des adresses qui ont traversé les époques sans jamais perdre leur âme. Fondée en 1865 par un couple savoyard, cette institution centenaire est bien plus qu’un restaurant — c’est un fragment du patrimoine vivant de la capitale.
Depuis sa création, Mollard a toujours été synonyme d’élégance et de convivialité. Dès 1895, l’établissement attire les voyageurs et les artistes du quartier de la gare Saint-Lazare, fasciné par son décor flamboyant signé Édouard Niermans, architecte du Negresco et d’Angelina. Mosaïques italiennes, vitraux colorés, colonnes de marbre, luminaires finement ouvragés : tout y respire la Belle Époque et l’esprit parisien.
Mais comme beaucoup de joyaux, Mollard a connu les aléas de l’histoire. Les guerres, les modes et les modernisations successives ont parfois masqué la splendeur d’origine du lieu. Jusqu’à ce qu’un homme, Stéphane Malchow, petit-fils de la famille Gauthier — propriétaire depuis 1929 — décide de redonner à Mollard tout son éclat.

Un travail d’orfèvre pour une brasserie d’exception
À la tête de la maison depuis 2002, Stéphane Malchow a entrepris une série de restaurations ambitieuses, portées par le talent de l’architecte Philippe André, déjà connu pour ses réalisations à La Demeure Montaigne ou La Rose du Pont. Ensemble, ils partagent une même vision : respecter l’histoire tout en redonnant vie à la beauté originelle du lieu.
Après la restauration de la façade en 2012, puis la recréation de la verrière centrale en 2017 — retrouvée grâce à une carte postale d’époque —, la brasserie poursuit aujourd’hui sa métamorphose. Les salons du fond, longtemps oubliés, ont été intégralement restaurés avec la participation d’artisans d’art : le maître verrier Éric Bonte, le mosaïste de l’atelier Lilikpo, et un marbrier italien qui a sélectionné les pierres dans les mêmes carrières que celles de 1895.
Sous leurs mains, les mosaïques Art déco, vertes et dorées, ont retrouvé leur éclat. Des miroirs aux lignes fluides évoquent la pluie sur les façades parisiennes, tandis que trois panneaux de verre gravé façon Lalique, représentant des nymphes, jouent avec la lumière comme autant de reflets du passé.

L’esprit d’une maison vivante
Derrière sa façade classée aux monuments historiques, Mollard continue de vibrer au rythme des grandes brasseries parisiennes. Sous la direction du chef Arnaud Regnier, fidèle à la maison depuis 1995, la cuisine célèbre les fruits de mer, les poissons et les classiques intemporels : foie gras maison, rognon flambé au cognac, bouillabaisse et crêpes au Grand Marnier.
Chaque assiette rend hommage à une tradition française généreuse, dans un cadre où le marbre, le verre et la lumière dialoguent comme au premier jour.
Un joyau du patrimoine parisien
Classée monument historique depuis 1989, la brasserie Mollard n’est pas qu’un lieu à admirer : c’est une expérience sensorielle et culturelle. Entrer chez Mollard, c’est faire un voyage dans le temps, entre les fastes de la Belle Époque et la vitalité du Paris contemporain.
Grâce à cette rénovation d’exception, la brasserie retrouve sa splendeur d’origine, tout en s’inscrivant dans l’avenir. Une renaissance qui prouve qu’à Paris, certaines légendes ne vieillissent jamais — elles se réinventent.
